Poème

J’écris

J’écris au nom de la lumière

et du feu qui me hâlent,

en éclaboussant mes yeux de braises infernales

déposées à l’autel d’un quelconque Olympie,

au nom de la folie.


J’écris au nom des hurlements,

sirènes éoliennes,

au nom de ma harangue et au nom de mon verbe

dispersés et jetés à qui veut les entendre

rire de ma folie.


J’écris au nom de la bourrasque

qui m’agite en tous sens :

Don Quichotte exalté pour d’insensées chimères

que je suis seul à voir quand moi seul elles appellent,

aux yeux de ma folie.


J’écris au nom du rideau sombre

qui embue mes prunelles,

creusant des fleuves amers aux replis de mes joues,

rivières d’un sang acre qui jamais ne tarit,

au nom du désespoir.


J’écris au nom des songes

dans lesquels je me noie

sans espoir de salut que de me réveiller

pour à nouveau sombrer dans un monde aussi noir,

au goût de désespoir.


J’écris au nom de ma douleur,

du froid intérieur,

compagnon glacé battant d'un cœur de pierre,

sans envie d’en guérir si ce n’est en enfer,

par peur du désespoir.


J’écris au nom de mon exubérance

et des douleurs perdues,

des pleurs asséchés aux arbres reverdis.

J’écris pour éloigner Janus qui me convie

à vivre sa folie.


J’écris au nom du retour des grandes espérances

pourtant toujours déçues.

J’écris à la mort, à la vie, toutes deux confondues.

J’écris au nom de toutes mes compagnes et copains

d’infortune, aujourd’hui, à venir,

dépressifs ce jour, expansifs demain,

quand le ciel est rieur,

quand l'eau se fait noyade.


J’écris pour te garder quand tu te fais sultane,

m'enroulant dans tes atours diaphanes

opalisant ma vue de la réalité.

J’écris pour te tuer quand tu te fais Satan

au bal des maudits où parfois tu m'attends


Pauvres hommes que nous sommes, où est la liberté ?

J'écris pour te tuer, j'écris pour te garder.

C’est le stylo qui guide parfois ma pensée.

J’écris pour t’échapper. Aujourd’hui j’écris pour

t’oublier, Hypomania, mon Satan, mon Amour.


Bruno Pinel, 2005